Nous étions passés devant en bus en direction de l'Empire State Building après avoir longé Central Park par la Cinquième avenue le matin du premier dimanche et j'avais juste à peine eu le temps de remarquer le cube de verre sans imaginer vers quel sous-sol il donnait accès : des dizaines d'ordinateurs ouverts, non seulement en démonstration mais offerts à la manipulation, on n'hésite pas, on se précipite sur un MacBook Air, c'est l'occasion, on consulte ses e-mails, on navigue sur Internet, puis on passe aux tables où sont exposés les I-pod, les I-Phones, on baigne dans le bruit, la musique, les conversations, l'armée de jeunes vendeurs en T-Shirts bleus veille, l'air presque désœuvrés, gardiens bienveillants, discrets, polis et prévenants ; nul besoin de sauter sur le client, c'est le client qui saute sur tous ces merveilleux jouets contemporains pour tous les âges, libre de désirer, de tripoter, soupeser, zapper, blogguer, naviguer sur l'immense réseau mondial en accès immédiat qui donne l'impression de se trouver exactement au centre du monde. Et peu importe si cette fois je n'ai rien acheté, et comme moi beaucoup d'autres, la séduction a joué, elle aura des résonances, des ondes de propagation. Au pied de l'escalier le jeune vendeur en T-Shirt bleu nous souhaite une bonne journée. La veille au soir, tombant par inadvertance sur le même cube illuminé et attiré comme un insecte vers ses parois vibrantes, apercevant l'activité qui s'y jouait en contrebas, j'avais cru un moment de pas désirer descendre dans la caverne merveilleuse, me situer au-dessus de ces désirs, (enfin juste dans la limite qui me permet de croire les maîtriser) et j'avais trébuché sur la dénivellation qui entoure le cube comme un fossé léger au moment même où un gardien du temple en costume me prévenait aimablement "Mind the step, Sir". J'avais souri. Et puisque j'avais trébuché, autant descendre.
C L
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